Le général de corps d’armée Lionel Lavergne, commandant de la gendarmerie d’Outre-mer depuis un an, a été auditionné par la Délégation sénatoriale aux Outre-mer sur les modes d’action et d’adaptation de l’État dans les territoires ultramarins.
le général Lavergne a insisté sur l’adaptabilité constante de la gendarmerie, à la fois au niveau local et central. Il s’en explique devant le Pandore :
Le Pandore : Quelle est la particularité des territoires ultramarins en matière de délinquance? Pourquoi les statistiques sont-elles aussi affolantes ?
Général de corps d’armée Lionel LAVERGNE : Sur les territoires ultramarins, l’on observe des phénomènes de délinquance importants. Voici quelques chiffres qui éclairent sur l’ampleur de ces phénomènes dans les Outre-mer ; il s’agit de ratios rapportés à l’ensemble de la gendarmerie nationale: 15 % des atteintes aux biens constatées par la gendarmerie nationale sur l’ensemble du territoire français ; 25 % des violences physiques crapuleuses ; 10 % des violences intrafamiliales; 30 % des homicides et tentatives d’homicide ; plus de 50 % des vols à main armée. En 2023, un tiers des vols à main armée par armes à feu constatés par la gendarmerie nationale ont été perpétrés en Guyane, et un tiers des vols commis par armes blanches l’ont été à Mayotte. Les Outre-mer représentent également un quart des faits liés à la grande criminalité, et 50 % des règlements de compte constatés par la gendarmerie nationale le sont en Guyane. Ces chiffres montrent la réalité de ce que nous vivons dans les Outre-mer. Autrement dit, nos gendarmes sont confrontés, dans les territoires ultramarins, à une violence importante, plus importante que dans l’Hexagone, sans pour autant que l’on puisse employer le terme « d’affolant ».
Les agressions contre les gendarmes sont plus importantes qu’en métropole. Comment l’expliquer ?
GCA Lionel LAVERGNE : En effet, en 2023,50 % des agressions de gendarmes départementaux et de gendarmes mobiles ont été commises dans les territoires ultramarins ; et ces agressions ont représenté 25 % des blessés de la gendarmerie nationale. Les gendarmes en Outre-mer sont engagés dans des contextes singuliers et beaucoup plus compliqués. D’un point de vue sociétal, cette grande violence est d’abord dirigée contre la population locale. Et, ensuite, elle se répercute de fait sur les forces de l’ordre dans l’exercice de leur fonction au profit de la sécurité de nos concitoyens.
Pourquoi la question des originaires est-elle une problématique essentielle ?
GCA Lionel LAVERGNE : Les territoires ultramarins se caractérisent par une multiplicité de statuts juridiques, de cultures et d’identités qu’il est fondamental de prendre en compte. Le lien avec la population passe par là et la présence des originaires des territoires y contribue grandement. Par exemple, dans l’exercice de notre mission de police judiciaire, au niveau des gardes à vue, la présence d’originaires permet de régler le problème de traducteurs. La gendarmerie d’outre-mer a bien évidemment un modèle spécifique de gestion des ressources humaines basé sur les temps d’affectation et le nécessaire équilibre entre originaires et non-originaires. Cela dit, tous les territoires ne sont pas attractifs pour les originaires, en particulier les Antilles, la Guyane et Saint-Pierre et Miquelon, en fait les territoires de l’océan Atlantique. Ces territoires sont clairement un de mes d’effort en matière de recrutement et de présence d’originaires de ces territoires.
La question des originaires dans les outre-mer revêt une grande importance, également du point de vue qualitatif. En effet, il est important, qu’à mérite équivalent, les originaires puissent accéder à des postes à responsabilités.
Il est donc essentiel de parvenir, dans tous les territoires ultramarins, à trouver un équilibre entre les originaires et les non-originaires.