En Seine-Maritime, une cheffe de service de la direction du soutien opérationnel (SDSO) de la police nationale est accusée d’avoir fait travailler au noir des employés de son service pour réaliser des travaux dans sa résidence personnelle. Cette affaire, révélée par France Bleu Normandie, fait l’objet d’une enquête administrative menée par l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) depuis juillet. Les accusations incluent des travaux non rémunérés ou partiellement payés, des promesses d’évolution de carrière en contrepartie de ces services, et des primes illégales attribuées à son fils.
Travaux à domicile et soupçons d’abus d’autorité
De juin 2022 à avril 2024, des agents techniques de la SDSO auraient été sollicités par leur supérieure hiérarchique pour rénover entièrement sa maison située à Saint-Aubin-lès-Elbeuf, près de Rouen. Selon leurs témoignages, ces travaux incluaient la plomberie, l’électricité, le carrelage, ainsi que des aménagements extérieurs tels que la pose de grillages et la réalisation de dalles. Les agents affirment avoir été payés en espèces, lorsque cela était le cas, et estiment que près de 10 000 euros leur seraient encore dus. En parallèle, certains agents rapportent avoir été employés à des tâches personnelles pour cette cheffe de service, comme sortir son chien.
Ces activités auraient eu lieu, pour la plupart, pendant les heures de travail des fonctionnaires concernés. En retour, la cheffe de service leur aurait promis des évolutions de carrière. Par exemple, dans un compte-rendu professionnel datant d’avril 2024, elle décrivait l’un de ces employés comme un « excellent professionnel » méritant une promotion. Ces promesses de reconnaissance professionnelle auraient été utilisées comme levier pour inciter les agents à réaliser ces travaux.
Primes illégales pour le fils de la directrice
Outre les travaux dans sa maison, la cheffe de service est accusée d’avoir manipulé le système de primes pour favoriser son fils, embauché fin 2023 comme contractuel au sein du service. Selon des rapports d’explication rédigés par les agents concernés, elle aurait ordonné à certains fonctionnaires titulaires de reverser une partie de leur prime de fin d’année, appelée Complément indemnitaire annuel (CIA), à son fils ainsi qu’à deux autres agents contractuels. Pour cela, elle aurait gonflé les primes des titulaires jusqu’à 1 000 euros. Ces pratiques ont été documentées par des témoignages, des messages, et des vidéos.
Réactions et enquêtes en cours
Ces révélations ont suscité des réactions indignées au sein de la police et des syndicats. Karim Bennacer, secrétaire départemental du syndicat Alliance, a dénoncé ces agissements comme « scandaleux », soulignant l’importance de l’exemplarité au sein des forces de l’ordre. Il a demandé que « toute la lumière soit faite » sur cette affaire. L’IGPN poursuit ses auditions à Rouen pour éclaircir les faits, mais aucune enquête judiciaire n’a été ouverte à ce stade, selon le procureur de la République de Rouen.
Démentis de la mise en cause
L’avocate de la cheffe de service, maître Laura Kalfon, a fermement rejeté ces accusations, invoquant le devoir de réserve de sa cliente et rappelant qu’une enquête administrative est en cours. Elle a également souligné que sa cliente n’avait aucun pouvoir décisionnel direct sur les promotions des membres de son service et se réserve le droit de déposer plainte pour dénonciation calomnieuse.