On ne présente plus Geneviève de Fontenay ! La « dame au chapeau » restera à jamais liée au concours Miss France, auquel elle a consacré plus de soixante ans de sa vie. Singulière, elle a joui d’une popularité indéfectible auprès des Français. Elle symbolisait des valeurs de bienséance, de savoir-vivre, d’élégance féminine, et de respect des traditions, bien souvent en voie de disparition. Geneviève de Fontenay nous a séduit par son franc-parler et ses prises de position proche du Peuple « avec un P majuscule », comme elle l’a souvent dit. Elle était notre amie, l’amie du « Pandore » à qui elle avait consacré une interview en juillet 2018, que nous vous proposons de redécouvrir.
Elle a parcouru les plateaux de télé et de radio, fait l’objet d’innombrables reportages dans la presse magazine, et enchaîné les interviews tant elle était sollicitée… Geneviève de Fontenay était dynamique, affable, spontanée, souriante et perspicace avec une jolie dose d’humour! Elle a souvent accepté de nous parler sans langue de bois, et insistait régulièrement sur son attachement à la gendarmerie. Cet entretien date du mois d’août 2018.
Le Pandore – Geneviève, on vous voit partout, on vous entend partout. Quel est le secret de votre forme ?
Geneviève de Fontenay – Oui, j’en ai des choses à dire, et j’ai de plus en plus de coups de gueule à pousser. Ce n’est pas facile de répondre à votre question. Je pense d’abord que je suis bien dans ma tête. J’ai connu des malheurs, des coups durs dans la vie, mais j’ai réussi à dominer la situation, à ne pas perdre mon enthousiasme pour ce que je fais, afin de toujours rester motivée ! Je me suis occupée des concours Miss France pendant 60 ans, mais je me suis tout autant intéressée à d’autres domaines, comme la politique. Ainsi, en ce moment, je communique beaucoup par SMS avec le président Emmanuel Macron ! Je l’appelle Emmanuel ! Il lit et répond à mes messages, mais ne commente pas. Encore dernièrement, je lui faisais part de mon mécontentement quant au passage à l’heure d’été, et il m’a répondu : « Vous avez la même obsession que Brigitte. Je vous embrasse ! »
Je dis toujours ce que j’ai envie de dire. Ainsi lorsque j’ai été invitée à l’émission de Jean-Jacques Bourdin, sur RMC, il y a quelques temps, il a reçu un flot d’emails qui disaient : « Enfin quelqu’un qui dit des choses que l’on n’entend pas toujours. » Les journalistes ne posent pas toujours les bonnes questions. D’un autre côté, il y a surtout le public. Je suis souvent interpellée dans la rue et je réponds à tout le monde. Je ne refuse jamais un autographe ou de prendre une photo avec quelqu’un qui me le demande. Une dame, qui faisait le ménage dans les trains, m’a dit une fois : « Vous êtes la seule personne à qui on ose demander de faire une photo », et c’est un des plus beaux compliments que j’ai reçus ! Le public est toujours présent, je reçois beaucoup d’emails et notamment de jeunes.
Le Pandore – Vous êtes une femme de conviction. On se souvient d’un de vos gestes remarqué à l’époque : votre refus de la Légion d’honneur. Pourquoi cette décision ?
Geneviève de Fontenay – Oui effectivement, j’ai refusé. J’avais déclaré que l’on ne distribue pas « la Légion d’honneur comme on distribue des médailles en chocolat ». Vous avez vu à qui on distribue la Légion d’honneur ? Pour célébrer un magnifique contrat d’armement, de 10 Md $ (soit 8,5 Md €, NDLR), le président Hollande a remis au prince héritier d’Arabie Saoudite, ce que j’appelle la médaille du « déshonneur » ! Avant, Sarkozy l’avait donnée à Kadhafi ! Bachar el Assad, décoré également de la Légion d’honneur, a été invité au défilé du 14 juillet, et s’affichait devant les corps constitués ! Moi si j’étais passée par là, je lui aurais dit : « Dégagez ! Qu’est-ce que vous faites là ? » C’est un type épouvantable. Poutine l’a eu aussi ! Et puis, il y a les « people », comme on dit, à qui on la distribue également. Maintenant c’est « à la tonne ». La Légion d’honneur était, auparavant, quand même réservée aux personnes ayant réalisé des choses pour la nation à un niveau supérieur ! Par exemple, Simone Veil, je suis d’accord. Mais là, cette haute distinction a perdu de sa valeur, on la distribue à n’importe qui.
Le Pandore – Les héros sont-ils indispensables dans notre société ? Allusion faite au lâche assassinat du colonel Arnaud Beltrame.
Geneviève de Fontenay – Oui tout à fait, c’est un héros. C’était aussi un catholique pratiquant et cela a beaucoup influencé sa décision. Il a aussi agi par charité, pour aider son prochain. Il ne pouvait pas laisser cette femme dans une telle position, otage du terroriste et pratiquement condamnée. Je pense que, selon sa conception du métier de gendarme, il fallait avoir de la dignité, du respect, du courage. Le colonel Beltrame s’est dévoué. Il n’a pas demandé l’autorisation à son supérieur avant d’agir. Il a agi spontanément ! Rappelons-nous de la polémique, autour des soldats de l’opération « Sentinelle », qui ne sont pas intervenus lors de l’attentat au Bataclan parce qu’ils n’en n’avaient pas reçu l’ordre. Nous sommes dans un état de droit, d’accord, mais correspond-il encore à la guerre que nous menons actuellement ? Nous ne sommes plus dans un schéma classique d’une armée qui va arriver pour nous attaquer. Les jihadistes sont partout et nulle part et cela change tout ! On parle de 150 détenus radicalisés qui vont être libérés. Il faut revoir les choses de fond en comble car cela ne correspond plus à la réalité. On vit dans un monde d’une extrême violence.
Le Pandore – Les héros sont-ils nécessaires au renforcement de nos valeurs ?
Geneviève de Fontenay – Oui bien entendu. Etre un héros, cela dépend aussi des circonstances, mais ce genre de réactions, cela ne se commande pas. C’est inné. Je suis issue d’une famille très catholique et l’aînée de 10 enfants. Ma mère nous disait toujours : « Il faut de la dignité, en toute circonstance, le respect de soi et le respect des autres. » C’était notre devise. J’adhère à beaucoup d’associations, et toute cette misère m’est insupportable dans un pays de cocagne comme la France. Ces personnes qui dorment dans la rue, dont beaucoup de femmes…
Le Pandore – Vous semblez parfois avoir un regard assez dur sur l’évolution de notre société ?
Geneviève de Fontenay – Nous sommes dans une société qui part en vrille, notamment quand on voit la violence qui se développe. Comme ce malheureux Kévin, âgé de 17 ans (ville de Mourmelon), qui a reçu 18 coups de couteau par un garçon qui aurait suivi un scénario de meurtre précis, et dont il se serait inspiré en voyant certaines vidéos ! Les gamins de 7 à 10 ans qui, avec les smartphones et tablettes, peuvent avoir accès à des sites pornographiques. Internet est capable du meilleur comme du pire. C’est terrible, c’est une jeunesse perdue ! Il y a quelques mois, rue de la Roquette à Paris un affrontement, entre jeunes âgés d’une quinzaine d’années, s’est soldé par la mort d’un garçon poignardé ! En Picardie, un gamin de 9 ans violé et tué ! Sans compter la drogue ! C’est épouvantable.
J’ai des années derrière moi, mais je n’ai jamais vécu des atmosphères de ce genre. Le ministère de la Santé et celui de l’Education devraient se pencher plus sérieusement sur ces questions. La violence s’est banalisée. Les forces de l’ordre font ce qu’elles peuvent, mais sont parfois désarçonnées. Il faut dire aussi que leur installations ne sont pas toujours ce qu’il faudrait, leur équipement non plus.
Il y a certainement des choses qui leur manquent… Je peux le dire, je suis très inquiète pour l’avenir. Cela fait trente ans que l’on n’a rien fait de bien, et maintenant cela nous tombe sur la tête. Par ailleurs, les inégalités sociales sont toujours présentes. Je ne pense pas que le chômage va réellement baisser, alors que le CAC 40 a fait 90 Md € de bénéfices en 2017. On a supprimé l’impôt sur la fortune
Le Pandore – Vous avez une affection particulière pour la Gendarmerie. A quand remonte-t-elle ?
Geneviève de Fontenay – Tout d’abord, Sainte-Geneviève est leur patronne ! Maintenant on la fête le 26 novembre, mais longtemps ce fut le 3 janvier. Quand je rencontre des gendarmes, ils sont toujours charmants. Evidemment, j’aime tous les représentants des forces de l’ordre, mais je trouve que chez les gendarmes il y a quelque chose de différent. On les voit dans les petites communes, ils vont voir les personnes âgées pour prendre de leurs nouvelles, ils sont plus proches de la population. Il y a comme plus « d’humanité ». C’est une autre façon de voir les choses de la vie.
Le Pandore – Lorsque l’on repense au faste qui entourait les anciennes élections de Miss France, on a un peu de nostalgie. Comment aviez-vous réussi à associer la gendarmerie, à l’événement ?
Geneviève de Fontenay – C’est mon fils Xavier, qui se chargeait très bien de cela, et notamment des cortèges, il a toujours eu de très bons rapports avec la gendarmerie. Il était presque fasciné. Sa contribution à Miss France a été très importante et on se complétait beaucoup. Xavier avait eu un chaleureux contact avec le général Guy Parayre (directeur général de la gendarmerie nationale), lorsque la Garde républicaine a fêté les 50 ans du Comité Miss France au Futuroscope ! J’en suis fière ! J’ai également été reçue par la Garde républicaine et je me suis rendu boulevard Henri IV, à Paris. Merveilleux !
Le Pandore – Avez-vous toujours des rapports très privilégiés avec les gendarmes ? Vous avez déjà été prise en flagrant délit d’infraction routière, au volant de votre voiture. Comment avaient réagi les gendarmes ?
Geneviève de Fontenay – Je me souviens d’un jour, où nous étions avec les Miss, les robes, etc. Nous devions nous rendre du côté d’Annecy et nous étions en retard. J’avoue avoir appuyé un petit peu trop sur le champignon, et nous nous sommes fait arrêter par les gendarmes. Je me suis vraiment excusée et finalement cela s’est terminé par une séance d’autographes ! Une autre fois, j’avais oublié ma carte bancaire dans une station-service, et des motards m’ont coursée pour me la rapporter ! Dernièrement, j’étais au volant de ma voiture. Il y avait de la circulation et un gendarme me fait signe. Je baisse la vitre et je lui dis : « Mais qu’est-ce que j’ai encore pu faire comme bêtise ? » Il m’a répondu : « Rien du tout ! Je veux juste faire une photo avec vous ! » Que de bons souvenirs !
Le Pandore – Avez-vous un message à communiquer à nos lecteurs gendarmes ?
Geneviève de Fontenay – Je veux leur exprimer mes sentiments de reconnaissance pour tout ce qu’ils font, leur dévouement, leur courage, la dignité dont ils font preuve dans toutes leurs missions. De plus, quand ils partent de chez eux le matin, ils ne savent pas comment ils vont rentrer le soir. Ce sont les gardiens de la route, des communes, des villages, de nos régions. Tout ce qui fait la vitrine de la France ! Ils sont très bien placés pour être les meilleurs dans ce domaine. J’aurais été fière de partager ma vie avec un gendarme !