Pour les gendarmes, c’est l’une des bonnes nouvelles de l’année. Le 2 octobre dernier, Emmanuel Macron a annoncé la création de 239 nouvelles brigades d’ici 2027, dont 93 dans des casernes fixes. Des implantations que les élus accueillent souvent avec enthousiasme. Encore faut-il qu’ils aient les moyens de construire les bâtiments. Ces dernières années, cela n’a pas toujours été le cas.
Pendant près de trois ans, Alain Bourgoin maire d’Oudon (Loire-Atlantique) a planché sur de nouveaux bâtiments pour sa gendarmerie. Le terrain était trouvé, les plans terminés et 200 000 euros dépensés en travaux préparatoires. Mais en décembre 2022, le projet, devenu trop cher, a été abandonné. « Le coût des matériaux a explosé, c’est vraiment dû à l’inflation. Il faut être responsable et donc on a décidé d’arrêter le projet », se souvient l’élu. Les coûts de construction de la gendarmerie sont passés de 2 millions d’euros à plus de 3,5 millions d’euros. La commune n’a pas pu suivre. Et c’est un sérieux problème car en France, pour créer une caserne, la participation des collectivités est essentielle.
Quand un projet est validé, l’Etat s’engage à financer les soldes des militaires et leurs équipements. Les collectivités territoriales elles doivent prendre en charge la construction des bâtiments qu’elles louent ensuite à l’Etat. Pour parvenir à remplir leur part du contrat, certaines communes vont jusqu’à prendre un important risque financier comme à Etupes, dans le Doubs, pour une caserne entrée en service en 2009. A l’époque, pour financer sa gendarmerie, Etupes a souscrit un partenariat public privé. Elle a confié la construction des bâtiments à un maître d’ouvrage, qu’elle rembourse depuis chaque année. Problème : jusqu’à récemment, les traites – indexées sur un taux variable – ont augmenté au fil du temps alors que le loyer que verse l’Etat à la commune est resté presque fixe. Au bout des remboursements, la perte devrait s’élever à plus de 3 millions d’euros.
Pas d’enveloppe exceptionnelle pour les collectivités
Par dizaines, ces dernières années, les difficultés des collectivités à construire leur caserne se sont affichées à la une de la presse. Florilège : « L’engagement financier de l’Etat jugé insuffisant » (Le journal du centre, 17 octobre 2023), « Le maire s’interroge » (Var Matin, 3 octobre 2023), « Le financement de la nouvelle gendarmerie en question » (La Dépêche, 29 décembre 2022). Alors, ces problèmes d’argent peuvent-ils remettre en cause les annonces récentes d’Emmanuel Macron ? Le jour même des annonces, le 2 octobre dernier, l’Elysée indiquait dans un article de France 3 que l’aide aux collectivités était « en train d’être calée ». Une déclaration que ne confirme pas vraiment le projet de budget 2024. Avec David Ramos, gendarme et président de l’association GENDXXI, nous avons décrypté ce document provisoire mais instructif. On y lit notamment que, pour toute la France, les subventions de l’Etat aux collectivités pour les constructions de casernes devraient s’élever, en 2024, à 3,6 millions d’euros. C’était 10 millions d’euros dans le même projet pour le budget 2023. Une réduction surprenante alors que des dizaines de nouvelles brigades doivent voir le jour.
Face à ces chiffres en baisse, nous avons contacté un conseiller du ministère de l’Intérieur. Au téléphone, il assure qu’aucune enveloppe extraordinaire n’est prévue pour aider les collectivités. Ces derniers jours, ces prévisions de baisse de budget nous ont été confirmées par un parlementaire spécialiste des questions de défense. Comme plusieurs de nos sources, il espère que le budget sera revu à la hausse d’ici 2027, date limite de construction des casernes annoncée.
Retrouver l’intégralité de la chronique de GendXXI dans Le Pandore n°37