Le cyclone Chido, survenu le samedi 14 décembre 2024, a dévasté Mayotte, archipel français de l’océan Indien. Ce cyclone, le plus puissant enregistré dans la région depuis 90 ans, a causé des destructions massives, plongeant l’île dans une situation humanitaire et logistique désastreuse.
Destruction massive et habitat précaire
Avec des vents dépassant les 220 km/h, Chido a ravagé Mayotte, où environ un tiers de la population vit dans des habitats précaires, souvent construits en tôle. Ces habitations ont été presque totalement détruites, laissant des milliers de personnes sans abri. Les dégâts matériels sont considérables : arbres déracinés, poteaux électriques renversés, infrastructures publiques et privées à terre. Selon Ousseni Balahachi, un infirmier à la retraite, « le tribunal, la préfecture, des écoles et des commerces sont détruits. » Les routes sont impraticables, et les communications sont gravement perturbées. La reprise des vols commerciaux ne pourra pas avoir lieu avant une dizaine de jours, selon les autorités.
Un bilan humain difficile à établir
Les autorités locales redoutent un bilan humain très lourd, avec potentiellement « plusieurs centaines » de morts. Cependant, l’estimation exacte reste compliquée pour plusieurs raisons : la forte tradition musulmane locale exige l’enterrement des défunts dans les 24 heures, ce qui empêche un recensement précis. En outre, Mayotte compte une importante population clandestine, estimée à plus de 100 000 personnes, souvent invisibles dans les décomptes officiels. Ces habitants, vivant majoritairement dans des bidonvilles, ont été particulièrement vulnérables. Beaucoup n’ont pas rejoint les abris prévus par la préfecture, par crainte d’une expulsion, exacerbant les pertes humaines.
Situation sanitaire critique
Le système de santé de Mayotte est gravement affecté. L’hôpital principal, situé à Mamoudzou, a subi des dégâts importants, notamment dans les services essentiels comme la chirurgie, la réanimation, les urgences et la maternité. Les centres médicaux périphériques sont également inopérants. Malgré ces dommages, les équipes médicales continuent de travailler dans des conditions précaires. La ministre de la Santé démissionnaire, Geneviève Darrieussecq, a annoncé l’activation de la réserve sanitaire et l’envoi de matériel médical d’urgence.
Pénurie d’eau, de nourriture et insécurité
L’eau courante et l’électricité sont largement coupées sur l’île, aggravant la situation des sinistrés. Dans les centres d’hébergement provisoires, les ressources en eau et nourriture sont insuffisantes. Des témoignages, comme celui de Salama Ramia, sénatrice de Mayotte, ou du kinésithérapeute Lucas Duchaufour, évoquent une faim croissante et une détresse palpable, notamment chez les enfants.
En parallèle, un climat d’insécurité s’installe, avec des scènes de pillage rapportées dans la zone industrielle de Kawéni à Mamoudzou. Le préfet a mobilisé des forces importantes pour maintenir l’ordre, mais la population craint les agressions et les vols, comme en témoigne Océane, une infirmière locale.
Depuis Mayotte, le général de division Pierre Poty, commandant en second de la gendarmerie des outre-mer, a souligné la gravité de la situation alors que les secours et les forces de l’ordre s’activent sur le terrain.
1 600 gendarmes et policiers sont déjà déployés, dont 800 gendarmes : 350 gendarmes départementaux et 450 gendarmes mobiles.
Sur place, leurs missions consistent à concourir aux opérations de secours ; à reconnaître et déblayer les axes routiers, notamment pour faciliter l’intervention des secours ; et à garantir l’ordre public afin de rassurer la population et de prévenir les éventuels pillages.
Réponse des autorités et mobilisation nationale
Face à l’ampleur de la catastrophe, une réunion de crise a été convoquée par le président Emmanuel Macron ce lundi 16 décembre au ministère de l’Intérieur. Les ministres Bruno Retailleau (Intérieur) et François-Noël Buffet (Outre-mer) sont arrivés sur place pour évaluer la situation.
Un pont aérien et maritime a été établi entre Mayotte et La Réunion, située à 1 400 kilomètres. Des renforts en matériel, en rations alimentaires, et en équipes de secours, notamment un hôpital de campagne, sont en cours d’acheminement. Au total, 800 personnels de la sécurité civile ont été déployés pour secourir la population et rétablir les services de base, comme l’approvisionnement en eau. À plus long terme, les autorités prévoient une phase de reconstruction massive pour remettre en état les infrastructures essentielles et relancer les fonctions de l’État.
Un défi humanitaire et logistique
La gestion de cette crise met en lumière les vulnérabilités structurelles de Mayotte, département le plus pauvre de France. L’habitat précaire, la forte densité de population et le manque de ressources locales compliquent l’organisation des secours. Le cyclone Chido agit comme un révélateur des inégalités et des fragilités socio-économiques du territoire, nécessitant une réponse coordonnée et durable.
Mayotte fait face à une catastrophe sans précédent, mêlant destructions matérielles, pertes humaines et crise humanitaire. L’urgence est désormais de répondre aux besoins vitaux de la population tout en amorçant une reconstruction durable et résiliente.