Le général Bertrand Soubelet, ancien numéro 3 de la Gendarmerie nationale, a publié sur Facebook la lettre bouleversante d’un militaire de Barkhane. En cette journée d’hommage aux Invalides, « Le Pandore et la Gendarmerie » la publie in extenso.
« Je publie ce texte écrit par un militaire français déployé au sein de la force Barkhane, touché par la mort de ses frères d’armes mais lucide sur la situation de notre pays. Servir la France c’est d’abord l’aimer et défendre ce qu’elle est. Aujourd’hui défendre la France est un combat qui se déroule aussi et surtout sur le sol national.
Ce cri est celui des enfants de France qui s’adressent à une classe politique atone et à trop de nos compatriotes qui, au-delà de quelques secondes de considération, n’ont d’autre préoccupation que leur propre sort. » Ainsi s’exprime le général Bertrand Soubelet avant de publier in extenso la lettre d’un militaire de Barkhane.
« L’heure n’est pas à la critique, mais au deuil.
E t si critique il doit y avoir par la suite,ne devrait-elle pas plutôt se produire sous forme d’introspection, pour une Nation qui envoie ses plus braves enfants à la mort afin de combattre au loin les racines du mal, ce même mal qu’elle laisse prendre racine en son sol?!!!
Nos camarades sont morts dans l’exercice du métier qu’ils avaient choisi, un métier noble pour de nobles fils de France…
C’est leur faire insulte que de laisser prospérer en terre de France les comparses de ceux qu’ils combattent.
Donner du sens, ce n’est pas trouver les mots qui font frissonner et verser des larmes dans la cours des Invalides.
Donner du sens c’est faire preuve dans l’exercice des fonctions politiques, d’un courage équivalent à celui de ceux qui ont le sang versé…
Ce courage est garant de la notion de Patrie. De la mère Patrie, celle-la même dont nous célébrions encore il y a peu la puissance sacrificielle incarnée par les poilus. Car quelle digne mère donnerait son sein à ceux qui se réjouissent de la mort de ses fils?
Ce faisant, peut être les dirigeants se montreront-ils à la hauteur de ceux qu’ils dirigent.
Pas de ceux qui râlent mais ne contribuent pas au Bien Commun, pas de ceux profitent du système, pas de ces parvenus qui crachent dans la main qui les nourrit, pas de ces égoïstes qui n’ont souci que de leur petite personne, vautrés dans leur confortable nombrilisme consumériste.
Non pas ceux-là. Ceux-là sont les plaies d’une nation.
Non, il leur est un devoir de se montrer à la hauteur de ceux, parmi les citoyens, qui incarnent encore l’idée « qu’il n’y a pas de plus grand amour que donner sa vie pour ceux que l’on aime »…
Maintenant loin de tous ces soucis terrestres ayant trait au Bien Commun pour lequel vous êtes morts, puissiez-vous, chers camarades, reposer en paix dans la félicité éternelle que Dieu n’accorde qu’aux hommes justes et droits, aux nobles âmes…
Puisse-t-Il abreuver de Ses grâces vos veuves et orphelins qui, une fois l’éphémère souffle de l’émotion médiatique convenue retombé, se retrouveront bien seuls pour affronter un quotidien dans lequel personne ne se souciera plus d’eux, si ce n’est vos frères d’armes, et qui devront grandir en affrontant le choc de l’indifférence à l’héroïsme de leur père, ne pouvant sublimer en la cohérente beauté de leur Mère Patrie la perte d’un mari et d’un père…
France, quand cesseras-tu de faire souffrir ceux qui t’aiment en fôlatrant avec ceux qui concourent à ta perte ?… »
Un militaire de Barkhane